Les trolls russes n’auraient pas eu d’influence sur les électeurs américains en 2016 ? Difficile d’y croire…
Il y a quelques semaines est paru un article qui montre que, au moins sur Twitter, avoir interagit avec un troll russe en 2016 n’a pas modifié l’idéologie de l’électeur ayant interagi. L’explication proposée est la suivante : les citoyens en question avaient déjà des opinions tranchées, et interagir avec les trolls n’y a rien changé.
Mais peut-on vraiment croire ce résultat ?
Pour moi, la réponse est non. Et la raison est simple : il est issu d’observations menées sur… 44 personnes seulement. C’est très peu, cela amène à une marge d’erreur énorme, et pire encore on sait que les 44 personnes de l’étude ne sont pas représentatives de l’électeur américain moyen :
The number of users in the panel who were identified as interacting with IRA accounts for the first time within the brief relevant time window was small — just 44 individuals, versus 1,106 who didn’t. Those 44 included some who may have engaged with just a single tweet. It shouldn’t come as much of a surprise that one brief exposure to a Russian bot doesn’t substantially alter one’s political views. It’s also worth noting that the sample wasn’t statistically representative of the U.S. electorate: The users surveyed were self-identified Republicans and Democrats who use Twitter at least three times a week and were willing to share their handle as part of the study. The panel intentionally recruited both “strong” and “weak” partisans from each side so their views could be compared, but left out independents. And of course, Twitter isn’t the same as Facebook or Instagram: It’s possible that Russian accounts had more impact on other platforms, for various reasons.
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Est-ce que ce résultat est faux pour autant ? D’après-moi la réponse est qu’on en sait rien : un échantillon de 44 individus est trop petit pour conclure quoi que ce soit.
Entendons-nous bien : il est tout à fait envisageable que l’hypothèse avancée dans ce papier soit vraie, et que les trolls de propagande, au moins sur Twitter, ne fonctionnent pas très bien. Mais ça n’est pas avec une base de données de 44 individus aux caractéristiques très particulières que l’on pourra conclure quoi que ce soit à ce sujet.
Pour finir, est-ce que cette étude est une mauvaise étude ?
D’après moi, non plus. Les auteurs font ce qu’ils peuvent avec les données à leur disposition, et je ne suis pas sûr qu’il existe une grosse littérature sur l’influence des trolls de propagande sur les réseaux sociaux. Cette étude me semble utile et intéressante. Mais ça n’est qu’une étude. Et j’aurais aimé, lors de sa sortie, que les médias soient un peu plus prudents dans leur couverture de ses résultats, plutôt qu’à reprendre un peu bêtement le communiqué de presse de l’université d’une partie des chercheurs…
- Détails sur l’étude (en anglais)
- L’article publié